Après avoir conspué la licence des thermes antiques, l’époque médiévale a inventé son propre art du bain, mixte et collégial, alliant hygiène et… plaisir.
L’art du bain médiéval, entre étuves collectives et cuveaux de bois
Jugés immoraux par la Chrétienté qui lie la nudité au péché originel, les bains antiques sont dénoncés comme des lieux de débauche au début de l’ère médiévale. Si la chute de l’Empire romain d’Occident précipite le déclin des thermes publics dont l’entretien n’est plus assuré, cet art de vivre connaît pourtant une forme de résurgence à partir du XII° siècle. Longtemps honni par le pouvoir religieux qui s’est employé à éradiquer fermement toute manifestation de la culture gréco-romaine, le bain retrouve une place importante dans la société moyenâgeuse quand l’époque féodale voit s’éloigner le spectre des invasions et les pandémies qui conduisaient à voir en l’eau un élément de propagation de maladies mortelles… Lorsque les chevaliers qui rentrent des croisades vantent au grand jour les bienfaits des hammams découverts sur le chemin de la Terre Sainte, l’ascétisme qui prônait la dissociation du corps et de l’esprit peine à convaincre. La population aspire alors à joindre l’utile à l’agréable en associant le fait de se laver à davantage de volupté, en phase avec l’esprit galant qui caractérise l’amour courtois…
L’art du bain rime avec beauté, séduction et santé
Au quotidien, la toilette se limite à la purification des mains et du visage, mis à part les nourrissons pour lesquels les traités de médecine recommandent jusqu’à trois lavages. Les parties les moins exposées du corps des adultes sont invitées à l’immersion ponctuelle dans des baignoires remplies d’eau chaude parfumée de camomille, marjolaine, romarin, écorce d’oranges ou feuilles de lauriers… Contrairement aux palais, comme celui de Jacques Coeur, argentier du roi Charles VII qui possédait à Bourges des appartements dédiés au bain, et aux monastères à l’instar de l’abbaye de Cluny dotée de quatorze bains avec système d’étuves, les maisons disposent très rarement de cette commodité. Aussi, des étuves publiques voient le jour dans les grandes villes. A la fin du XIII° siècle, Paris en compte déjà 27. Mais, pour la majorité des habitants de la capitale, il faut choisir entre manger du pain ou prendre son bain car le droit d’entrée équivaut au tarif de plusieurs miches. Les plus pauvres se baignent donc encore au ruisseau…
Des banquets aux baquets de bain
Les enluminures décrivent ces lieux d’hygiène ainsi que les réceptions « au salon d’eau » données leur château. Au sein des étuves urbaines, hommes et femmes se baignent nus mais coiffés. Conçues sur le modèle des tonneaux de vinification, les baignoires de bois sont tapissées d’un drap de lin pour éviter les échardes et filtrer l’eau d’un client à l’autre. Dans un esprit festif, voire libertin, les petites cuves, souvent surmontées d’un dais de tissus qui garde la chaleur, accueillent les couples. De plus spacieuses reçoivent les groupes. Chacun peut aussi prendre place sur des gradins pour le bain de vapeur. De longs repas arrosés de vin sont servis sur des planches posées à même les baquets. Le pont de baignoire Tombolo en stratifié chêne ou noyer avec encoches pour verres à pied proposé depuis peu par Victoria + Albert s’en inspire t’il ? Ces établissements offrent des services divers qui vont de la coiffure au barbier, en passant par les massages, l’épilation ou encore les saignées. A proximité, des chambres prolongent cette promiscuité et la prostitution y est monnaie courante… A l’aube de la Renaissance, ces bains publics souffrent d’une sulfureuse réputation. Contre l’épidémie de peste et de syphilis qui sévit en Europe, les médecins exhortent à les fuir sous peine de mort et le clergé jette à nouveau l’anathème sur cette pratique.
L’art du bain au Moyen-Âge
Après avoir conspué la licence des thermes antiques, l’époque médiévale a inventé son propre art du bain, mixte et collégial, alliant hygiène et… plaisir.
L’art du bain médiéval, entre étuves collectives et cuveaux de bois
Jugés immoraux par la Chrétienté qui lie la nudité au péché originel, les bains antiques sont dénoncés comme des lieux de débauche au début de l’ère médiévale. Si la chute de l’Empire romain d’Occident précipite le déclin des thermes publics dont l’entretien n’est plus assuré, cet art de vivre connaît pourtant une forme de résurgence à partir du XII° siècle. Longtemps honni par le pouvoir religieux qui s’est employé à éradiquer fermement toute manifestation de la culture gréco-romaine, le bain retrouve une place importante dans la société moyenâgeuse quand l’époque féodale voit s’éloigner le spectre des invasions et les pandémies qui conduisaient à voir en l’eau un élément de propagation de maladies mortelles… Lorsque les chevaliers qui rentrent des croisades vantent au grand jour les bienfaits des hammams découverts sur le chemin de la Terre Sainte, l’ascétisme qui prônait la dissociation du corps et de l’esprit peine à convaincre. La population aspire alors à joindre l’utile à l’agréable en associant le fait de se laver à davantage de volupté, en phase avec l’esprit galant qui caractérise l’amour courtois…
L’art du bain rime avec beauté, séduction et santé
Au quotidien, la toilette se limite à la purification des mains et du visage, mis à part les nourrissons pour lesquels les traités de médecine recommandent jusqu’à trois lavages. Les parties les moins exposées du corps des adultes sont invitées à l’immersion ponctuelle dans des baignoires remplies d’eau chaude parfumée de camomille, marjolaine, romarin, écorce d’oranges ou feuilles de lauriers… Contrairement aux palais, comme celui de Jacques Coeur, argentier du roi Charles VII qui possédait à Bourges des appartements dédiés au bain, et aux monastères à l’instar de l’abbaye de Cluny dotée de quatorze bains avec système d’étuves, les maisons disposent très rarement de cette commodité. Aussi, des étuves publiques voient le jour dans les grandes villes. A la fin du XIII° siècle, Paris en compte déjà 27. Mais, pour la majorité des habitants de la capitale, il faut choisir entre manger du pain ou prendre son bain car le droit d’entrée équivaut au tarif de plusieurs miches. Les plus pauvres se baignent donc encore au ruisseau…
Des banquets aux baquets de bain
Les enluminures décrivent ces lieux d’hygiène ainsi que les réceptions « au salon d’eau » données leur château. Au sein des étuves urbaines, hommes et femmes se baignent nus mais coiffés. Conçues sur le modèle des tonneaux de vinification, les baignoires de bois sont tapissées d’un drap de lin pour éviter les échardes et filtrer l’eau d’un client à l’autre. Dans un esprit festif, voire libertin, les petites cuves, souvent surmontées d’un dais de tissus qui garde la chaleur, accueillent les couples. De plus spacieuses reçoivent les groupes. Chacun peut aussi prendre place sur des gradins pour le bain de vapeur. De longs repas arrosés de vin sont servis sur des planches posées à même les baquets. Le pont de baignoire Tombolo en stratifié chêne ou noyer avec encoches pour verres à pied proposé depuis peu par Victoria + Albert s’en inspire t’il ? Ces établissements offrent des services divers qui vont de la coiffure au barbier, en passant par les massages, l’épilation ou encore les saignées. A proximité, des chambres prolongent cette promiscuité et la prostitution y est monnaie courante… A l’aube de la Renaissance, ces bains publics souffrent d’une sulfureuse réputation. Contre l’épidémie de peste et de syphilis qui sévit en Europe, les médecins exhortent à les fuir sous peine de mort et le clergé jette à nouveau l’anathème sur cette pratique.
Comme avant elle la cuisine, la salle de bains décloisonne. L’enjeu : former non plus une succession de pièces mais un espace à vivre aux fonctionnalités fusionnées, en interaction avec la chambre et le dressing. Influencée par le langage cosy du living, l’avant-garde des designers brouille les codes en créant des produits hybrides qui hissent la pièce au rang de salon d’eau : baignoire divan ou bibliothèque, vrai-faux lampadaire tête de douche, meuble en enfilade…
Baignoire Sofa de Glass 1989 – Design by Meneghello Paolelli Associati Reposant sur une structure en bois naturel ou bois laqué blanc brillant, cette baignoire en îlot en MineraLite blanche brillante est une proposition stylée. Modèle sans trop-plein, avec bonde UP&Down chrome brillant et siphon esthétique. 188 x 89/67 x 77/50 cm. 4 850 e H.T.
Depuis qu’elle se rêve (et se vit) confortable et distinguée, la pièce la plus éminemment privée de la maison manifeste une curiosité flagrante pour le design. Puisqu‘à l’heure du bain et de la douche, forme, fonction et performance entendent désormais être en parfaite concordance, les faiseurs de style que sont les designers lorgnent du côté du salon pour inspirer leurs créations. De prime abord, l’idée semble incongrue tant il est de coutume d’opposer, au sein de l’habitat, les espaces à vivre et ceux destinés à la stricte intimité. Question d’usage et d’échelle. De distance symbolique aussi, entre la zone ample où l’on se réunit en famille et entre amis et les lieux confinés, pour ne pas dire secrets, dans lesquels s’exerce l’intimité. Là où le cercle des invités ne croise jamais celui, aussi privilégié que protégé, de notre for(t) intérieur. Mais, dans le fond comme dans la forme, le décloisonnement des pièces modifie la donne et ouvre des horizons porteurs, jusque-là peu explorés…
Console Armonia de ANTONIO LUPI – Design by Roberto Lazzeroni Tandis que les miroirs biseautés parent les murs, cette élégante console en noyer américain massif puise ses lignes dans les années 50 et fait twister les matériaux en mixant l’effet brut de la texture du piètement de bois aux surfaces laquées. 108 x 54 x 74 cm. Plan vasque encastré en finition mate, Ceramilux brillante ou verre. Hauteur 11 cm.
DANS SES PROPRES QUARTIERS
Entre cuisine, salon et salle à manger, les frontières sont couramment gommées comme elles tendent à s’effacer aussi dans la salle de bains, reliée de façon efficace à la chambre et au dressing quand il ne s’agit pas d’abattre murs et antagonismes avec l’architecture intérieure pour trait d’union. Au sein du foyer, deux grands pôles « concurrentiels » se dessinent donc. D’un côté la sphère collective, de l’autre la sphère individuelle… Derrière ce jeu de miroirs inversés, le lifestyle est mis en abyme. Si le salon, considéré comme une pièce à l’aménagement qualitatif est érigé en exemple, c’est que chacun aspire à jouir du même luxe dans ses « propres » quartiers, au sens premier et figuré. Du luxe, oui, mais exclusif cette fois. Très en vogue, la salle de bains devient le dernier « salon d’eau » à la mode, celui où il faut se voir plutôt que d’être vu, un endroit calme où l’on ne cause pas spécialement, sauf peut être avec soi-même.
Showerlamp de AXOR Design by Nendo La douche de tête (ø 27,5 cm) à éclairage LED intégré (5 W) conçue par le japonais Oki Sato pour le fabricant Axor repousse les limites de la robinetterie en associant l’eau et la lumière pour une expérience unique en son genre. Avec raccord de plafond (7,3 cm) ou bras de douche (42,8 cm) et différentes finitions (nickel brossé, doré, noir, blanc). Alimentation séparée en 12 V. A partir de 1548 e, corps d’encastrement non compris.
LE GLOSSAIRE DU LIVING
Prolongeant l’esprit des pièces à vivre, la salle de bains n’hésite plus à y puiser ses éléments de décor. Le mobilier anime l’espace d’audacieuses compositions issues du répertoire du living. Et pour cause, la grammaire stylistique du salon s’avère nettement plus riche que celle de la salle de bains, longtemps cantonnée à des ambitions plus techniques qu’esthétiques… De longilignes consoles au caractère vintage changent la physionomie des lieux (Esperanto/Rexa Design, Armonia/ Antonio Lupi) quand pour « meubler » l’espace différemment, d’autres produits initient un déploiement en hauteur tels des cabinets empreints de préciosité (Fluent/ Inbani). Sur le segment du moyen et haut de gamme, la plupart des fabricants européens proposent aussi des solutions
d’aménagement semi-ouvertes afin de créer des niches, des décrochements, avec des hauteurs et des profondeurs de rangement différentes mais cohérentes, à la manière des étagères ou du mobilier hi-fi. Sur les flancs des baignoires, des rayonnages ont fait également leur apparition pour accueillir livres et magazines, à l’instar de KellyBook (Mastella Design), Swim C (Boffi), Cartesio (Agape), Biblio Series (Antonio Lupi), Egg (Rexa Design)…
Esperanto de REXA DESIGN – Design by Monica Graffeo Modulable, cette nouvelle collection se compose d’unités de stockage indépendantes de différentes tailles avec tiroirs laqués en façade (96 × 52 × 48 cm). Le mobilier repose sur des tréteaux en bois et, à la manière d’une coupe évasée trônant sur un buffet bas, une vasque en verre soufflé «Murano» (ø 48 cm), assume sa fonction en beauté, toute en transparence fumée. Miroir avec cadre en verre bronze (ø 80 cm). A partir de 6 375 e H.T.
LE SALON D’EAU : UN DÉCOR GLOBAL
Personnalisable grâce à une palette étendue de finitions, la pièce prend volontiers des allures de petit boudoir qu’en langage neutre les agenceurs nomment « suite parentale »… La notion de suite est justement une autre piste fondamentale de réflexion. Elle renvoie directement à l’univers hôtelier qui se révèle être un terrain d’exploration pour l’architecture intérieure, le challenge étant de recréer, en un nombre de mètres carrés relativement limités, un chez-soi d’apparat qui amalgame efficacement chambre, bureau, dressing, salon et salle de bains. En abrégé, un décor global qui se prête à tous les scenarios individuels sans renoncer au raffinement : la salle de bains se réinventerait ainsi en up-gradant son standing. Pour mettre en scène le large panel de ses collections de « salles de bain à vivre », le fabricant allemand Duravit possède pertinemment à Paris un show-room baptisé avec justesse « salon d’eau ».
Tête de douche murale Closer de Zucchetti Design by Diego Grandi A la manière d’une applique lumineuse paradoxalement dépourvue d’éclairage, cet insolite tête de douche en aluminium (ø 9,5 cm) repose sur un système de pivot mural (horizontal ou vertical) qui permet d’orienter intuitivement le jet multidirectionnel en déplaçant le bras (80,5 cm). Finition chrome ou noir.
REFLETS ET MIMÉTISME
Vitrines de l’innovation, les salons professionnels (dé)montrent combien cette pièce aspire à changer de statut en bousculant les stéréotypes. Fini la salle de bain figée dans un cadre hygiéniste, le design débride tout. Marouflant les murs, des trompe-l’oeil vernis d’une solution hydrofuge « tapissent » les cloisons de motifs (Affreschi/Antonio Lupi, Wet System / Wall&Deco). Aussi waterproof que ces toiles aux allures de facsimilé, les tableaux lumineux d’AIC Design « capturent » des œuvres d’art sous des panneaux XXL en verre synthétique adaptés à toutes les contraintes techniques. Au sol, le plancher s’exporte volontiers dans les pièces humides. De bois, il n’en a souvent que l’aspect, avec des lattes de carrelage plus vraies que nature grâce à une impression en relief qui contrefait de façon bluffante les aspérités et les nuances chromatiques du parquet et « lambrisse » même les crédences de lavabo… Côté tapis de bain, la simple carpette cède du terrain à des créations plus originales qui pourraient aussi bien trouver place aux pieds du canapé qu’en sortie de douche (Abyss & Habidecor).
Baignoire Roma de Glass Design Exposée au Cersaie de Bologne, cette cuve transfigure les classiques : bassin ou canapé, Roma théâtralise le bain en formant une loge vers laquelle convergent les regards, médusés.
TROUBLANTES ANALOGIES
C’est dans la douche que cette forme de réplication étonne le plus. L’ADN des lampes de salon contamine génialement la robinetterie pour en révolutionner les codes et inventer des usages, savamment hybridés. Dévoilée au Cersaie, la tête de douche Dynamo Rainbow de Cristina est doté d’un éclairage LED auto-alimenté et calque ses lignes sur celles d’une suspension globulaire tandis que Zucchetti mise sur un bras rotatif avec Closer qui a fait sensation à Milan avec son esthétique plutôt industrielle. En développant l’idée atypique du studio japonais Nendo, Axor innove plus encore avec un sensationnel jet d’eau retombant du rebord d’un abat-jour métallique, la lumière s’associant sans danger à l’eau pour créer une expérience composite, sans précédent.
Baignoire KellyBook de Mastella Design Avec ses rayonnages (diverses finitions de bois et laque opaque/brillante/métallisée), cette baignoire « culturelle » recevra vos ouvrages préférés. En Mak Mat, matériau acrylique (mélange de minéraux et résines), mat, soyeux au toucher et très résistant. 274 litres. 175/220 x 75/120 x 51 cm. 7 350 € (en niche) ou 8 450 € (en îlot).
Couchage Relax de Kaldewei Bain et relaxation ne font plus qu’un avec ce lit de détente adapté aux baignoires Kaldewei. La pièce se mue en spa et s’adapte à vos besoins individuels. Inspiré de l’équipement des yachts, cet accessoire se replie en accordéon dans son rack. iF product design award 2011. Existe en noir, beige, carmin, anthracite et chocolat. 170/180/190/200 x 75/80/90/100 cm.